Situé en face de Marseille, la Côte Bleue bloque l’horizon de la rade de la ville. Même si il n’est pas à côté de chez moi, j’affectionne particulièrement ce coin car il ressemble à celui que j’ai roulé pendant pas mal d’années, les Calanques. Dans ces zones de bord de mer, le calcaire est roi, les passages rocheux et techniques sont légion, la vue est tout simplement incroyable.
Ride, Spot & SUNN
Qui a dit que dans le sud il faisait toujours beau ? Et quelle idée d’aller affronter les sentiers techniques de la Côte Bleue par un temps glacial et venteux ? C’est pourtant le rendez-vous que je vous donne !
Après un week-end radieux et très doux, il déboule subitement un vent glacial sur la France. Ça grelotte dans les chaumières, la neige descend, et le sud est frappé par un mistral rafraîchissant. C’est exactement à ce moment-là que je charge mon Kern pour aller en direction du Rove.
C’est la claque en sortant… Un froid terrible, le Mistral s’engouffre dans le véhicule, il fait 4 degrés. De l’atmosphère douce et chaleureuse de l’habitacle, je bascule dans une ambiance polaire. Le soleil est caché derrière une couche épaisse de nuages… Le Mistral a pour effet de chasser les nuages, mais là, il va falloir des heures, voir sans doute la journée…
Celui qui n’a jamais mis les pieds sur la Côte Bleue aurait du mal à imaginer le terrain. C’est un territoire coincé entre l’urbanisation industrielle du sud de l’étang de Berre et l’immensité sauvage de la Méditerranée. Que l’on plonge d’un côté ou de l’autre, en quelques kilomètres, la vision ne sera pas la même. D’un côté, le bruit de l’autoroute, la vision des usines, des centres industriels et de l’aéroport de Marseille, de l’autre le cri des goélands, le bruit des vagues Marseille au loin. Au milieu, c’est un vaste plateau constellé de pistes larges et étiré d’est en ouest. Dernière touche au tableau, entre les zones orientales et occidentales, le terrain change radicalement. Du roulant et du vallonné d’un côté, du cassant et très accidenté de l’autre. Tout cela sur 24 km de long sur 7 large, un mouchoir de poche !
La côte bleue est magnifique !
Cédric Tassan
Pour ma part, j’affectionne la partie ouest. Par rapport à ma pratique enduro, c’est la zone la plus intéressante. J’ai choisi un parcours intense, physique, qui alterne montées et descentes. Parfait pour rester en température ! Sur les crêtes le vent souffle violemment, mais les vues et la lumière sur la rade de Marseille sont incroyables. La mer scintille, brille de tous ses éclats. Comme quoi l’or n’est pas celui du compte en banque, mais celui que l’on peut expérimenter tous les jours. Rouler dans un tel décor m’enchante particulièrement. Je suis un visuel, je prends beaucoup de plaisir avec ce sens et j’en prends pour mon argent. Ici point de tunes, de flouze ou de fric, mais simplement une ambiance de métal que l’on me sert sur un plateau. J’atteins le point haut de mon parcours : 213 m ! Oui c’est peu ! Mais ce qui est incroyable c’est qu’en si peu de dénivelé, on peut se faire aussi bien plaisir que peur ! Car les sentiers ne sont pas de tout repos. On ne voudrait pas descendre ainsi pendant 1000 m de dénivelé. Quoi que ? La crête est magnifique, j’enchaîne les passages techniques : rocheux, pierres, remontées, franchissement, basculement. Il faut cravacher, pédaler, freiner, bouger son corps, alterner les positions. On pourrait croire qu’en VTT il suffirait de se caler dans une position et roule ma poule ! Ici, une position canapé derrière la selle et c’est la sanction rapide ! J’atteins le sentier du littoral. Je tire à droite, ça grimpe, je dois pousser de temps en temps, c’est l’envers du spot… Mais je trouve que cela fait partie aussi de notre activité. Je dis toujours qu’il suffit d’être très bon pour rester sur le vélo finalement. Bref, là, aujourd’hui, il faudrait être un mutant !
J’atteins le fort de Figuerolles. Les constructions militaires sont nombreuses dans le coin. Ce système défensif a été conçu par le général Raymond Adolphe Séré de Rivières. Bâtie à partir de 1874, cette installation permet de contrôler le trafic maritime et de protéger les côtes françaises. 40 ans après, elle (et les autres du secteur), subira l’épreuve du feu pendant la Première Guerre Mondiale. Les constructions sont démantelées et abandonnées après l’armistice de juin 1940. La vue est imprenable vers le sud et Marseille. Je profite du paysage, à l’abri d’un joli pin d’Alep, je savoure une première pause.
Le single continue de grimper, la pente régulière permet de rester sur le vélo. Le terrain est caillouteux, il faut s’adapter à ce manque d’adhérence. Il faut jauger, appuyer, doser. Au col, je bascule de l’autre côté, la descente en lacets est grisante. La visibilité est maximale, ici les arbres sont rares et la garrigue assez basse : on peut lâcher les freins. Plus bas, une zone bien technique survient : de la pente, une dalle, des graviers. Il faut rouler fino. Je roule le fond d’un vallon étriqué, les rochers sont nombreux. Presque arrivé à la mer, je suis happé par une arche monumentale, celle qui supporte la voie ferrée de la Côte Bleue ! Encore une particularité incroyable du secteur ! Il faut imaginer un train qui se balade dans la falaise, entre viaducs et tunnels ! Je rejoins la plage toute proche par un sentier bien caillouteux. L’eau est si claire que cela donnerait envie de s’y baigner ! Mais même si, il fait nettement meilleur que quand je suis parti, l’heure n’est pas à la natation…